Vernon Politique

La LNPN passe à Vernon

EdNonrev

Le 29 novembre dernier, la SNCF et Réseau Ferré de France étaient à Vernon pour présenter le projet de ligne nouvelle Paris-Normandie, et ses conséquences pour les usagers vernonnais. Les deux entreprises ont émis un message assez clair à la foule venue écouter et s’exprimer : selon elles, la situation en gare de Vernon ne pourra qu’être pire sans LNPN.

C’était un public nombreux (environ 400 personnes) et de tous âges qui était rassemblé ce soir-là. RFF et la SNCF, comme pour les autres débats, avaient mis les petits plats dans les grands, tenant à disposition du public leur propre rapport. La trentaine de cahiers d’acteurs déposés par des associations comme Vernon Train de Vie, les chambres de commerces le long de la Seine ou encore des partis politiques, étaient également à disposition.

Après avoir présenté le projet de manière succincte, avec ses différentes options, RFF et la SNCF ont répondu aux questions et déclarations, très nombreuses, des usagers vernonnais. Les intervenants présents ont lourdement insisté sur deux faits : le financement du projet est exceptionnel, provient directement des projets de l’Élysée, par l’intermédiaire de la loi Grenelle II sur l’environnement et du  Grand Paris. Par conséquent, si le projet ne se faisait pas, ces financements ne pourraient être réaffectés à la rénovation du réseau normand existant, par exemple (une demande formulée par les Verts et le groupe Vernon-défis) . La situation vernonnaise (retards et surcharges) , sans le projet, n’a aucune chance de s’améliorer1. Avec la LNPN, il est possible que cela aille mieux ou « moins mal » , sachant que tout dépendra de l’acharnement des élus locaux (et d’éventuelles subventions) pour obtenir des trains, lorsque le projet sera plus avancé.

Hypothétiquement, voici ce que RFF a « vendu » au public vernonnais, dans la meilleure des situations, pour une lointaine année 2040 : des temps de parcours de 32 min entre Paris Saint-Lazare et Vernon avec certains trains partant ou arrivant à La Défense, plus de trains, avec une bonne régularité, et un confort identique aux rames actuelles ( « ni grandes lignes, ni RER pour le futur matériel » ) . Mais cette situation dépend de nombreux facteurs : nouvelles rames plus rapides, une future gare de La Défense qui ne soit pas « en ligne »2 , une gare de Vernon améliorée (pas besoin de la déplacer pour cela, selon RFF), et des élus qui ont réussi à obtenir le maximum pour notre territoire3.

Voici donc un scénario plus probable, vers 2025 :

  • Un temps de trajet de 39 minutes au mieux, contre de 44 à 52 minutes actuellement. Ce temps s’allonge à 44 minutes si la gare de La Défense a une gare « en ligne » (qui oblige tous les trains à s’y arrêter) .
  • Probablement pas plus de trains directs entre Saint-Lazare et Vernon, leur futur nombre dépendant selon RFF des élus locaux, et des négociations qui se dérouleront quand le projet sera engagé4.
  • Des trains un peu moins remplis qu’actuellement, et plus de régularité.
  • Des tarifs en légère hausse ou sans hausse, en fonction des subventions régionales.
  • Pas plus de trains aux heures de pointe, plus aux heures creuses si les collectivités locales payent la SNCF pour cela5 .

Plusieurs intervenants ont fait part de leurs préoccupations environnementales, que ce soit à propos du modèle de développement proposé qui verra dans tous les cas augmenter indéfiniment le trafic ferroviaire, ou à propos des terres agricoles et forestières grignotées par cette ligne nouvelle. Si RFF n’avait pas de réponse à la première interrogation, à la seconde elle répondit que la LNPN utiliserait environ 700 hectares pour son passage dans l’Eure, ce qui représente « environ une année de consommation de terres » dans l’Eure (avec l’urbanisation notamment) , pour « un projet de développement d’une durée de plus de cinquante ans » .

Aux demandes des usagers, plus portées sur les temps de trajet et le nombre de trains, RFF n’a répondu qu’avec des hypothèses, citant à de nombreuses reprises les « futures autorités organisatrices » (État, régions, départements, communes) . Aucun engagement, aucune promesse n’a été faite à cette réunion sur ces sujets, car « il est trop tôt pour cela » selon RFF et la SNCF. Certaines demandes portaient sur les retards actuels, et l’utilisation de rames courtes qui cause de nombreux voyages debout : l’intervenant de la SNCF expliqua que l’entreprise avait de très gros problèmes de maintenance, évoquant la perturbation du centre d’entretien des Batignolles due aux projets de la mairie de Paris dans le secteur. Des problèmes qui devraient donc durer jusqu’en 2016, date prévue d’achèvement de ces grands travaux urbains au Nord de Paris.

Les Vernonnais, venus en nombre, semblaient pour beaucoup déçus des réponses de RFF et de la SNCF à la sortie de la réunion. RFF et la SNCF n’auront en effet pas fait mystère du peu d’importance pour eux de la ville dans leur projet. Cependant, l’association d’usagers Vernon Train de Vie a bien fait passer son message : plus de trains, des trains à l’heure, et des directs. Ces facteurs dépendront largement des capacités des élus du territoire à relayer ce message lors des négociations qui auront lieu dans quelques années si le projet se fait. Une réalisation qui sera également tributaire des résultats électoraux de 2012, et peut expliquer la hâte de RFF et de la SNCF à vouloir lancer leur projet.


Pour aller plus loin :

  • Le site créé à l’occasion de la LNPN par RFF, très bien fait, avec des archives des réunions, les cahiers d’acteurs et le rapport de RFF avec les différentes options de trajet.
  • L’excellent compte-rendu du projet et de leur cahier d’acteur, par l’association d’usagers Vernon Train de Vie, en cinq parties : partie 1, partie 2, partie 3, partie 4 et le compte-rendu de la réunion.
  1. Ce dont on pourra douter, les problèmes de Vernon étant clairement identifiés, et pouvant se faire hors du projet de LNPN : la limitation des voies entre Mantes et Paris, ainsi qu’une gare de Rouen surchargée.
  2. Une gare en ligne est située sur le trajet, obligeant les trains à s’y arrêter. Les trains, dans ce scénario en ligne, mettraient alors 37 min. L’autre possibilité, plus rapide pour les vernonnais, est que la voie allant à La Défense bifurque de la voie Mantes-Saint-Lazare.
  3. Car les autres élus voudront, eux aussi, un maximum de trains
  4. Selon les intervenants, sans la LNPN, la saturation du réseau fera probablement disparaître les trajets directs qui restent. Certains participants rappelèrent à la réunion que la désaturation de la ligne Rouen-Le Havre passe, pour eux, avant tout par l’ouverture d’une nouvelle voie entre Paris et Mantes, et une gare plus grande à Rouen, sans nécessiter une ligne nouvelle complète.
  5. Actuellement, selon RFF et la SNCF, la région Haute-Normandie subventionne déjà les billets à hauteur de 70 % , un chiffre qui semble très élevé