Vernon Politique

CAPE, Christophe Quétel demande aux maires d’éteindre les lumières

EdNonrev

Christophe Quétel, président de l’association nationale pour la protection du ciel et de l’environnement nocturnes (ANPCEN), pendant sa présentation. Les élus de la communauté d’agglomération étaient nombreux à être venus l’écouter.

La semaine dernière, juste avant le conseil communautaire, une présentation a été faite par Christophe Quétel, président de l’ANPCEN, éclairagiste de profession, et maire d’Irreville (près d’Évreux). C’est Jean-Claude Mary, ex-adjoint écologiste à Vernon et vice-président à l’environnement à la CAPE, qui est à l’origine de sa venue.

En faveur de la coupure ou de la réduction des éclairages publics, Christophe Quétel n’y voit que des avantages, de la protection de l’environnement à la réduction des dépenses communales. Mais a conscience de la difficulté pour les maires d’éteindre les lumières…

Sommaire :

  1. Éteindre, moins éclairer : que des bénéfices ?
  2. Les recommandations de l’ANPCEN
  3. Le SIEGE réceptif aux arguments de l’ANPCEN
  4. L’association face au lobby des éclairagistes
  5. Vernon, redémarrage de la démarche d’extinction

Éteindre, moins éclairer : que des bénéfices ?

L’argumentaire de Christophe Quétel est bien rôdé. Il commence par l’aspect environnemental de la pollution lumineuse : oiseaux et plantes, ainsi que les humains, sont perturbés par l’intensité de la lumière artificielle en pleine nuit. Mais, il le sait manifestement, ces arguments ne sont pas les plus convaincants face aux élus de la CAPE.

Alors, il change de registre. La réduction de l’éclairage public est “intéressante financièrement”. Cela représenterait jusqu’à 60 % d’économies pour les meilleurs élèves, comme sa commune d’Irreville.

Le président n’hésite pas à prôner l’extinction des feux pour réduire les accidents de la route, car les automobilistes feraient alors plus attention. Ils adapteraient également leur vitesse, un aspect important pour les petites communes.

Face aux interrogations relatives à la sécurité des habitants, il répond que les agressions et cambriolages se produisent très largement la journée ou en zones éclairées. Pour lui, la question est d’abord de se trouver “au mauvais endroit au mauvais moment”.

Les dégradations et incivilités ? Dans sa propre mairie, il affirme qu’il avait encore 1800 euros de réparations la dernière année avant réduction de l’éclairage. Et que depuis, “ça s’est arrêté”. Un phénomène qu’il estime commun dans l’agglomération d’Évreux, engagée dans une démarche de réduction de la pollution lumineuse.


Les recommandations de l’ANPCEN

Christophe Quétel déconseille aux élus d’éteindre un lampadaire sur deux, pour des questions de responsabilité légale. En dehors de l’extinction totale, qui est évidemment sa recommandation principale, il a donné nombre de conseils pour un éclairage moins agressif et moins coûteux.

Selon lui, “les trois quarts” des éclairages publics en France sont surdimensionnés. Il recommande l’installation de régulations horaires fines, réfléchies, pour éviter d’éclairer inutilement. Surtout, il affirme la nécessité de réduire les puissances d’éclairage, tout en installant des lampadaires situés plus bas, et qui éclairent d’abord le sol.

Son autre recommandation porte sur le type de lampe : seul le sodium serait intéressant, parce que sa lumière est jaune, et que tous les éléments sont facilement remplaçables et recyclables. À l’inverse, les lampes au mercure et à LED produiraient une lumière beaucoup trop blanche, néfaste aux oiseaux et aux plantes, et plus agressive pour l’homme.


Le SIEGE réceptif aux arguments de l’ANPCEN

Dans l’Eure et à la CAPE, c’est le syndicat mixte SIEGE qui gère l’installation et le remplacement des matériels d’éclairage pour les communes. Christophe Quétel déplore le fait que traditionnellement, pour ne pas avoir de plainte des élus, le syndicat ne prend “pas de risques” et éclaire plutôt trop que pas assez.

Il engage donc les élus à se montrer “pédagogues et diplomates” en demandant l’installation de luminaires adaptés, et en ne faisant pas systématiquement remonter les plaintes des habitants, qui resteraient très rares après réduction de l’éclairage.

Par ailleurs, le syndicat n’a “pas de temps” prévu pour la formation de ses techniciens à la réduction de la pollution lumineuse, ce qui pose “souci”. Mais le président de l’ANPCEN se montre positif : “tous, lorsqu’ils ont eu les informations, et accès aux documents, sont passés à des produits qui vont dans le bon sens”.


L’association face au lobby des éclairagistes

Ce lobby, c’est l’association française de l’éclairage (AFE), qui regroupe les acteurs de la filière. Et Christophe Quétel semble s’en méfier, au point de ne pas rendre publique sa présentation visuelle aux élus, car il ne veut pas qu’un “contre-argumentaire” apparaisse suite à une fuite.

Un des reproches majeurs faits actuellement à l’AFE par l’ANPCEN est la promotion des lampes à LED pour l’éclairage public. Difficiles à fabriquer, non réparables, non recyclables pour le moment, lumière encore trop blanche, longévité réelle très inférieure à la longévité théorique, la liste est longue, et le verdict asséné : le procédé n’est “pas au point” pour Christophe Quétel, du moins pas encore.

Face aux actions de l’AFE, l’ANPCEN répond avec ses présentations aux élus, mais aussi avec le label volontaire “Villes et villages étoilés”, qui récompense les communes qui éteignent le plus leurs éclairages. L’objectif en est de “présenter les actions bénéfiques plutôt que de montrer du doigt les pollueurs”.

Le label s’inspire de celui des “Villes et villages fleuris”, les communes se voyant attribuer de une à cinq étoiles en fonction de leurs actions. Elles peuvent alors installer un panneau en entrée de ville.


Vernon, redémarrage de la démarche d’extinction

À l’initiative de l’alors adjoint à l’environnement Jean-Claude Mary, Vernon avait signé en 2012 une charte avec l’ANPCEN. Aucune étoile ne fut attribuée à la ville dans le cadre du label. Si des extinctions ont eu lieu cette année-là dans certains quartiers, leur importance n’a pas été suffisante.

Le projet semblait à l’arrêt depuis la démission de l’adjoint écologiste. Jean-Luc Piednoir, adjoint socialiste chargé aujourd’hui de l’environnement, veut relancer le processus de réduction de la pollution lumineuse. Il va cependant “mettre en place une stratégie d’hyper-urbain plus que de rural” d’ici à la fin de l’année, et donne Évreux en exemple d’économies “financières et énergétiques”.